Codex de 2031


Codex de 2031, 2019
tirage jet d’encre pigmentaire et gouache
papier amate
19 x 112 cm
Installation avec affiche dos-bleu

Codex of 2031, 2019
pigment inkjet print and gouache
amate paper
19 x 112 cm
Installation with poster

Imitation d’un codex maya. Le texte est traduit sous la forme de glyphes maya et en anglais.
Travail en collaboration avec Jean-Michel Hoppan, épigraphiste, ingénieur d’étude au CNRS.
Traduction en anglais : Hervé Couvert
Le texte rapporte la découverte des mines d’argent mexicaines par les Européens ainsi que la fin du minerai pour l’année 2031. A la disparition annoncée du métal argent, résonne ici la destruction par les Européens des codex méso-américains et la perte de pans entiers de leur mémoire culturelle.

Imitation of a Mayan codex. The text is translated into English and tran-scribed in Mayan glyphs.
Work in collaboration with Jean-Michel Hoppan, an epigraphist and research engineer at the CNRS.
Translation into English : Hervé Couvert
The text narrates the discovery of Mexico’s silver mines by the Europeans and the anticipated end of silver ore reserves in year 2031. The announced end of silver metal echoes the destruction by Europeans of Mesoamerican codices and the loss of entire parts of Mesoamerican cultural memory.

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Voici le compte des Katun
Voici le compte des années
Où le Yucatan fut conquis
Quand le Yucatan bascula
Aux mains blanches des étrangers. 

L’an 1519, le Katun 2 Ahau
Le premier temps du compte initial
Où la terre brûle sous leurs paroles.
Quand la montagne tremble sous leurs pas.
Les seigneurs s’emparent de nos pierres. 

Rouges sont les barbes des fils du soleil
Rouge le sang séché sur nos grelots
Ce sont les fils de l’Est
Etrangers de la terre
Les hommes blancs
Les hommes rouges
Au commencement de la fleur de Mai.

En l’an Tun 13 Kan, 1566
Tout cela sera accompli.
La face obscurcie du soleil
Cachée dans la roche noire
Les galeries souterraines
Où plongent leurs désirs
Où les précieuses pierres
Coulent aux flancs des montagnes
Voici le sang séché
L’argent brille en son centre
Métal blanc des Itzas
Voici la nouvelle lumière. 

Les flots des pierres blanches
Coulent de nos montagnes
Les pierres précieuses Tun
Les pierres précieuses rouges
Brûlent aux quatre coins du ciel.

En l’an 1586
Les seigneurs de l’Orient
Auront sur leurs couronnes
Porteront sur leurs têtes
La folie rouge de nos pierres
La fleur séchée du soleil
De grands calices blancs
Qu’ils portent à leurs lèvres
Et jamais ne se tarissent
Les fontaines du ciel. 

En ce temps-là
L’argent oxydera
L’étendue de la terre
Les seigneurs du croissant de lune
Les empires Moghols, à l’est de la mer
A l’est de la terre
Frapperont leurs monnaie
Du marteau de nos pierres. 

Voici le compte des Katun
Voici le compte des années
Où le Yucatan se proclame la mamelle du monde
Quand tous s’abreuvent à nos montagnes blanches
Et que le compte du temps
Est une stèle
Pour une roche si puissante.

Alors grondera
En l’an 1839
L’ère nouvelle
Des cristaux de nos pierres
Dont l’éclat si léger
Vole, telle la poussière
Vapeur de métal lourd
Abattue par le ciel
Qui retombe platement
Sur l’autel qu’est l’image.

Vif bromure d’argent
Mordant la feuille de sel
Ecriture de lumière
Pour les formes à venir. 

L’an 1839 sera le temps de l’alchimie
Le pollen de nos fleurs embrume les esprits
Les rayons de l’argent et la photographie
Terniront de parole
La terre de nos ennemis. 

Viendra alors le règne des hommes périssables
Des hommes dont la mémoire est prise dans la pierre
Ils creuseront plus profond le lit de nos rivières
Et feront vomir du sang de la bouche de la terre.

L’argent est au coeur de toutes leurs lumières
Il charge de sa force leurs grands panneaux solaires
Il nourrit les bateaux, les centrales, les usines
Ou les photographies de tous leurs magazines. 

L’an 2031
Verra s’éteindre le règne de la fleur de mai.
Viendra s’achever le torrent de nos mines
Telle est la charge du katun.
Ce sera la fin de la pierre blanche et du peuple rouge des rêves.

Ce sera la fin de l’argent puisé à nos montagnes
Résonneront les tambours,
Tinteront les grelots
Ce sera la fin de l’image argentique.
La mémoire s’éteindra sans autre geste de colère.
Here comes the Katun counting
Here comes the counting of years
When Yucatan was conquered
When Yucatan tipped over
To the white hands of foreigners.

In the year 1519, on Katun 2 Ahau
The first stretch of the initial counting
The earth is scorched beneath their words.
The mountain shakes under their step.
The lords get ahold of our stones.

Red-bearded are the sons of the Sun
Red the dried blood on our bells
Here are the sons of the East
Foreigners of the earth
White men
Red men
At the blossoming of the frangipani flower.

In the year Tun 13 Kan, 1566
All of this will come to be.
The obscured face of the sun
Buried deep inside the black rock
The underground galleries
Wherein their desires lie
Where precious stones
From the mountain slopes drip
Here is the dry blood
Silver shining at its centre
White metal of the Itzas
Here comes the new light.

Rivers of white stones
Down our mountains flow
The jade
The red stones
Burning at the four corners of the sky.

In the year 1586
The lords of the East
Will adorn their brows
Their crowns
With the red madness of our stones
The parched flower of the sun
Great white chalices
To their lips elevated
May the fountains of the sky
Never run dry.

Come that time
Silver will oxidise
Earth in all its vastness
The Lords of the crescent moon
The Moghol empires, to the Eastern end of the sea
Of the land
Will mint their coins
With the hammer of our stones.

Here comes the Katun counting
Here comes the counting of years
As Yucatan heralds itself the bosom of the world
While our white mountains nurture them all
And the counting of time
Like a headstone
Heightens the power of that rock.

Rumble will then
In the year 1839
The new era
Of the crystals strewn from our rocks
The shine of which, so light,
Flies like dust and ashes
Heavy metal fumes
Sprinkling down from the sky
Flatly falling back
On the altar of Image.

Swift silver bromide
Bites the salt sheet
A writing of light
For the forms to come.

The year 1839 will mark the age of alchemy
The pollen from our flowers befuddling the minds
Photography and the rays of silver
Will tarnish with their speech
The land of our enemies.

Then will come the reign of perishable men
Whose memory is set in stone
They will dig deeper down our river beds
And make the mouth of the earth disgorge blood.

At the heart of their lights is silver
Loading their big solar panels with its strength
It nurtures their ships, power plants, factories
The pictures in all their magazines.

In the year 2031
Will the reign of the frangipani flower end.
Will the torrents of our mines run dry
Such is the load of the katun.
It will be the end of the white stone and the dream red people.

It will be the end of silver mining in our mountains
The drums will resound,
Jingle will the bells
It will be the end of analogue photography.
Memory will pass with no angry gesture.