Silicon Islands 






J’ai lu l’histoire du monde
Et contemplé de mes yeux
Le loup qui dévore
La bourrasque qui gifle
La fuite,
L’irrépressible fuite
Des biens et des valeurs
versés à grands flots
Dans le seau des puissants.

J’ai lu l’histoire du monde
J’ai lu celle du commerce
J’ai vu
Sur de tristes étals
Les joyaux de la terre
Et les matières précieuses
Et les matières premières
Exciter
Les feux sanguinolents.

J’ai lu l’histoire des choses
Et celles des conquêtes
J’ai vu
Les palmiers se coucher
Sous d’impérieux commandements
J’ai lu l’histoire des choses,
Ces choses vues
Qui ne seront jamais
pour mon ravissement.

Misères des ventres
Lames de colère
Mais rien ne bouge
Dans ce monde
qu’on appelle Occident.


Ami, qu’en est-il de la mémoire des jours ?
Ou trouver encore cette musique des cieux ?
Le temps a passé et mes rêves sont lourds
Engourdis très fort par des rires facétieux.

J’ai lu du monde entier
l’histoire des résistances
De ces chants
Que la parole emporte
Et que le vent apprend.
En hommage au brigand 
Le rictus de ma bouche
A forgé le sourire
Qu’aujourd’hui je suspens
J’ai lu, j’ai oublié.
Ou devrais-je dire volé.

Ami, dis-moi encore la mémoire des jours
Le souffle de la raison qui siffle entre tes dents
Quelques notes balancées, défiant la loi de Moore.
Jamais air de musique n’ébranla de titan.

Kilo, méga, gigaoctets
Ce que poésie jamais ne pourra contenir
Même si, attelée à la légende des jours
Elle cherche à raconter une guerre de cent ans.
Exa, zeta, yotta, ronna octets
Vainqueur que ce langage binaire
Qui tourne en une seconde à plus de mille tours
Comme si les mots du monde d’un seul coup j’avalais

Mémoire si gigantesque qu’on anime par calculs
Et qui chauffe
Dès que le monde financier avoisine la bulle
Cette mémoire dédiée à la spéculation
Cette mémoire gravée sur de nano-sillons
Cette mémoire où se compte le destin national
Cette mémoire d’où s’élève le grand capital
Cette mémoire conquise comme une terre coloniale.
Cette mémoire, je la vomis.
I have read the history of the world
And contemplated with my eyes
The wolf that devours,
The gust of wind that slaps your face,
The depletion
The unstoppable depletion
Of goods and values,
Poured in torrents
Into the bucket of the powerful of this world.

I have read the history of the world.
I have read the history of commerce.
I have seen
The jewels of the Earth
On sad stalls.
Precious materials,
Raw materials
That excite bloody fires.

I have read the history of things
And stories of conquest.
I have seen
Palm trees lie down
In answer to imperious commands.
I have read the history of things;
These things I have seen
But they will never be
for my delight.

The misery of empty stomachs.
An upsurge of anger,
But nothing changes
In this world
We call the West.

Friend, what about the memory of days?
Where else can you find this music from the heavens?
Time has gone by, and my dreams have become heavy
Turned numb by facetious laughter.

I have read stories of resistance
From all over the world
Songs
Transported by words,
Songs which the wind also learns.
In homage to the bandit,
My mouth’s rictus
Forged a smile
That today I have put on hold. 
I have read and I have forgotten
Or should I say had stolen.

Tell me,
Friend, tell me again the memory of days.
The breath of reason whistling through your teeth.
A few notes of music here and there defy Moore's Law.
Never has a tune shaken a titan.

Kilobytes, megabytes and gigabytes
Convey more than a poem could ever contain,
Even if, tackling the stuff of legends
It tried to tell the story of a hundred-year war.
Exabytes, zettabytes, yottabytes and ronnabytes
Are the winners in the binary language stakes,
A language that spins a thousand times a second,
Swallowing all the world’s words were in one fell swoop.

A memory so gigantic that it's activated by calculations
And as a result, gets hot.
As soon as the financial bubble looks close to bursting,
This memory dedicated to speculation,
This memory etched on nano-grooves,
This memory where the destiny of nations is at stake,
This memory on which big money is built,
This memory conquered like a colonial land,
This memory makes me sick.

translation: Simon Thurston



Codex 

the death of analog photography



Voici le compte des Katun,
Voici le compte des années
Où le Yucatan fut conquis,
Quand le Yucatan bascula
Aux mains blanches des étrangers.

L’an 1519, le Katun 2 Ahau,
Le premier temps du compte initial
Où la terre brûle sous leurs paroles,
Quand la montagne tremble sous leurs pas,
Les seigneurs s’emparent de nos pierres.

Rouges sont les barbes des fils du soleil,
Rouge le sang séché sur nos grelots.
Ce sont les fils de l’Est,
Etrangers de la terre,
Les hommes blancs,
Les hommes rouges,
Au commencement de la fleur de Mai.

En l’an Tun 13 Kan, 1566,
Tout cela sera accompli.
La face obscurcie du soleil
Cachée dans la roche noire,
Les galeries souterraines
Où plongent leurs désirs
Où les précieuses pierres,
Coulent aux flancs des montagnes.
Voici le sang séché,
L’argent brille en son centre,
Métal blanc des Itzas.
Voici la nouvelle lumière.

Les flots des pierres blanches
Coulent de nos montagnes.
Les pierres précieuses Tun,
Les pierres précieuses rouges,
Brûlent aux quatre coins du ciel.

En l’an 1586,
les seigneurs de l’Orient
Auront sur leurs couronnes,
porteront sur leurs têtes,
La folie rouge de nos pierres,
La fleur séchée du soleil,
De grands calices blancs
Qu’ils portent à leurs lèvres.
Et jamais ne se tarissent
Les fontaines du ciel.

En ce temps-là,
L’argent oxydera
l’étendue de la terre.
Les seigneurs du croissant de lune
Les empires Moghols, à l’Est de la mer,
A l’Est de la terre,
Frapperont leur monnaie
Du marteau de nos pierres.

Voici le compte des Katun,
Voici le compte des années
Où le Yucatan se proclame la mamelle du monde,
Quand tous s’abreuvent à nos montagnes blanches
Et que le compte du temps
Est une stèle
Pour une roche si puissante.

Alors grondera,
En l’an1839,
L’ère nouvelle.
Des cristaux de nos pierres
Dont l’éclat si léger
Vole, telle la poussière,
Vapeur de métal lourd
Abattue par le ciel
Qui retombe platement
Sur l’autel qu’est l’image.

Vif bromure d’argent,
Mordant la feuille de sel, 
Ecriture de lumière
Pour les formes à venir.
L’an 1839 sera le temps de l’alchimie.
Le pollen de nos fleurs embrume les esprits.
Les rayons de l’argent et la photographie
Terniront de parole
La terre de nos ennemis.

Viendra alors le règne des hommes périssables.
Des hommes dont la mémoire est prise dans la pierre.
Ils creuseront plus profond le lit de nos rivières
Et feront vomir du sang de la bouche de la terre.
L’argent est au coeur de toutes leurs lumières.
Il charge de sa force leurs grands panneaux solaires,
Il nourrit les bateaux, les centrales, les usines
Ou les photographies de tous leurs magazines.

L’an 2031 verra s’éteindre le règne de la fleur de mai.
Viendra s’achever le torrent de nos mines,
Telle est la charge du Katun.
Ce sera la fin de la pierre blanche et du peuple rouge des rêves.
Ce sera la fin de l’argent puisé à nos montagnes
Résonneront les tambours,
Tinteront les grelots,
Ce sera la fin de l’image argentique.
La mémoire s’éteindra sans autre geste de colère.


1566-1595  point culminant des métaux précieux américains en Espagne après la conquête des Amériques
1586-1615 pic de hausse dans le stock de roupies d’argent et donc de sa production
1839 : Arago défend l’invention du daguerréotype (l’ancêtre de la photo) devant la chambre des députés défense de Paris.
Pierre Tun : jade
Ésta es la cuenta de los katunes,
ésta es la cuenta de los años
cuando Yucatán fue conquistado,
cuando Yucatán cayó
en las manos blancas de los extraños.

Año 1519, Katún 2 Ahau:
el primer tiempo de la cuenta inicial,
cuando la tierra arde bajo sus palabras,
cuando la montaña tiembla bajo sus pasos:
los señores se adueñan de nuestras piedras.

Rojas son las barbas de los hijos del sol,
roja la sangre seca sobre nuestros cascabeles.
Son los hijos del Este,
extranjeros de la tierra,
los hombres blancos,
los hombres rojos
al inicio de la flor de mayo.

En el año Tun 13 Kan, 1566,
todo esto se cumplirá:
la cara oscurecida del sol
oculta en la roca negra,
las galerías subterráneas
donde se sumergen sus deseos,
donde las piedras preciosas
se derraman de las laderas de las montañas.
Ésta es la sangre seca:
la plata brilla en su centro,
el metal blanco de los Itzaes.
Ésta es la nueva luz.

Aludes de piedras blancas
fluyen de nuestras montañas.
Las piedras preciosas Tun,
las piedras rojas que arden
hacia los cuatro rumbos del Cielo.

En el año 1586
los señores de Oriente
tendrán sobre sus coronas,
portarán sobre sus cabezas
la locura roja de nuestras piedras.
La flor seca del sol,
los grandes cálices blancos
que llevan a sus labios:
que nunca se agoten
las fuentes del cielo.

En ese tiempo
la plata oxidará
la extensión de la Tierra.
Los Señores de la Luna Creciente,
los imperios mogoles
al Este del mar,
al Este de la Tierra
golpearán sus monedas
con el martillo de nuestras piedras.

Ésta es la cuenta de los katunes,
ésta es la cuenta de los años
cuando Yucatán se proclama
la ubre del mundo;
cuando todos abreven
de nuestras montañas blancas.
Y es que cuenta del tiempo es una estela
para una roca tan poderosa.

Entonces retumbará,
en el año 1839
la nueva Era
de los cristales de nuestras piedras
cuyo destello tan ligero
vuela como el polvo.
Vapor de metal pesado
abatido por el cielo
que cae en picado
en el altar que es la imagen.

Vívido bromuro de plata
mordente de la hoja de sal:
escritura de luz
para las formas por venir.
El año 1839 será el tiempo de la alquimia.
El polen de nuestras flores nubla los espíritus.
Los rayos de plata y la fotografía
empañarán de palabras
la tierra de nuestros enemigos.

Entonces vendrá el reino de los hombres perecederos,
hombres cuya memoria está grabada en la piedra.
Ellos cavarán más hondo el lecho de nuestros ríos
y harán que la boca de la tierra vomite sangre.
La plata está en el centro de todas sus luces,
recarga con su fuerza los grandes paneles solares
alimenta los barcos, las centrales eléctricas y las fábricas.
O las fotografías de todas sus revistas

El año 2031 verá apagarse el reino de la flor de mayo.
Llegará a su fin el torrente de nuestras minas
Será la cuenta de los katunes:
el fin de la piedra blanca y del pueblo rojo de los sueños.
Será el fin del dinero arrancado de nuestras montañas.
Resonarán los tambores,
sonarán nuestros cascabeles.
Así será el fin de la imagen de plata:
se extingue la memoria sin otro gesto de cólera.

traducción : Laura Gonzalez

1566-1595 Apogeo de los metales preciosos americanos en España tras la  de conquista de América.
1586-1615 Pico en las existencias de rupias de plata y, por tanto, en su producción
1839: Arago defiende de París la invención del daguerrotipo (el ancestro de la fotografía) ante la Cámara de Diputados
Tun Piedra: el jade
Here comes the Katun counting
Here comes the counting of years
When Yucatan was conquered
When Yucatan tipped over
To the white hands of foreigners.

In the year 1519, on Katun 2 Ahau
The first stretch of the initial counting
The earth is scorched beneath their words.
The mountain shakes under their step.
The lords get ahold of our stones.

Red-bearded are the sons of the Sun
Red the dried blood on our bells
Here are the sons of the East
Foreigners of the earth
White men
Red men
At the blossoming of the frangipani flower.

In the year Tun 13 Kan, 1566
All of this will come to be.
The obscured face of the sun
Buried deep inside the black rock
The underground galleries
Wherein their desires lie
Where precious stones
From the mountain slopes drip
Here is the dry blood
Silver shining at its centre
White metal of the Itzas
Here comes the new light.

Rivers of white stones
Down our mountains flow
The jade
The red stones
Burning at the four corners of the sky.

In the year 1586
The lords of the East
Will adorn their brows
Their crowns
With the red madness of our stones
The parched flower of the sun
Great white chalices
To their lips elevated
May the fountains of the sky
Never run dry.

Come that time
Silver will oxidise
Earth in all its vastness
The Lords of the crescent moon
The Moghol empires, to the Eastern end of the sea
Of the land
Will mint their coins
With the hammer of our stones.

Here comes the Katun counting
Here comes the counting of years
As Yucatan heralds itself the bosom of the world
While our white mountains nurture them all
And the counting of time
Like a headstone
Heightens the power of that rock.

Rumble will then
In the year 1839
The new era
Of the crystals strewn from our rocks
The shine of which, so light,
Flies like dust and ashes
Heavy metal fumes
Sprinkling down from the sky
Flatly falling back
On the altar of Image.

Swift silver bromide
Bites the salt sheet
A writing of light
For the forms to come.

The year 1839 will mark the age of alchemy
The pollen from our flowers befuddling the minds
Photography and the rays of silver
Will tarnish with their speech
The land of our enemies.

Then will come the reign of perishable men
Whose memory is set in stone
They will dig deeper down our river beds
And make the mouth of the earth disgorge blood.

At the heart of their lights is silver
Loading their big solar panels with its strength
It nurtures their ships, power plants, factories
The pictures in all their magazines.

In the year 2031
Will the reign of the frangipani flower end.
Will the torrents of our mines run dry
Such is the load of the katun.
It will be the end of the white stone and the dream red people.

It will be the end of silver mining in our mountains
The drums will resound,
Jingle will the bells
It will be the end of analogue photography.
Memory will pass with no angry gesture.


translation: Grégoire Couvert









Retour à Denpasar





C’est l’automne et j’entends ta voix
Ta voix chaude et rauque
Qui a la couleur des feuilles éteintes
Entre chaque phrase
Tes silences nous rapprochent un peu plus de l’hiver du monde
Quand tout était encore endormi
Sans désir
Et le monde tourne
A la ritournelle de ta voix
Et je soupire du temps qui ne passe pas

Au printemps, j’entends ta voix
Elle a les intonations rieuses d’une femme qui chante
Elle perce depuis ta tristesse en train de fondre
Elle jaillit à moi
Elle est nouvelle étreinte
O mon amour
Tu m’enlaces avec tes timides « oui »
Comme si un hoquet tendre te tirait vers moi

Cet été, je me suis brûlée au son de ta voix
A ses accents glacées qui m’ont dit « casse-toi »
je me suis cognée à l’angle de ta voix
Duquel surgissait le toi que je ne connaissais pas
Et la parole répare, et la parole retient
Chacune de nos paroles est désormais le lien
Qui ne se cassera pas

C’est bientôt l’automne et j’attends ta voix
Et mon cœur tremble déjà
A l’unisson avec l’émotion de ton souffle
A l’unisson avec la fêlure en toi
Que j’aime
Que j’aime ta voix.






Candy Crush 

Pour Agnès



Mon Candy, je suis girly de toi
Sous mes doigts
Les billes qui tombent
Je passe un tour
J’attends la bombe
Candy Candy total addict
Pas qu’un bonbon
Une compulsion
A l’écran, je colle et je sticke
Formes sucrées, Candy au miel
Boulimies de problèmes visuels
Y’a plus de temps
Y’a plus que toi
Sans compter mes yeux qui larmoient
Grenadine menthe ou bien citron
Quelle est la bonne combinaison
A force d’épuiser des vies
Je me fais de nouveaux amis
Candy à moi, Candy ça va
C’est toujours ça
J’réfléchis pas
A force d’passer les niveaux
J’me suis ruinée en lingots
Candy chéri, ôte tes sabots
L’amour c’est sûr c’est pour bientôt
En attendant j’connais le chemin
Il est en forme de serpentin !





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© Daphné Nan Le Sergent